Ecrivain français. Prix Nobel de littérature 2014
“Quand on aime vraiment quelqu'un, il faut accepter sa part de mystère. Et c'est pour ça qu'on l'aime.”Dans le café de la jeunesse perdue
“Pourquoi certaines choses du passé surgissent-elles avec une précision photographique ?”Rue des boutiques obscures
“Il y a des êtres mystérieux, toujours les mêmes, qui se tiennent en sentinelles à chaque carrefour de notre vie.”Villa triste
“Je voudrais traduire cette impression que beaucoup d'autres ont ressentie avant moi : tout défilait en transparence et je ne pouvais pas encore vivre ma vie.”Pedigree
“Ecrire un livre, c'est lancer des appels de phares ou des signaux de morse à l'intention de certaines personnes dont il ignorait ce qu'elles étaient devenues.”Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier
Commentaire de Patrick Modiano : "Tous mes livres sont des bouteilles à la mer. Mais je n'ai jamais eu de retour. Comme je suis un peu paranoïaque, j'ai toujours pensé que ce silence des personnes que je souhaitais atteindre était volontaire, qu'elles refusaient de me faire signe. Du moins m'encourage-t-il à écrire encore et lancer d'autres bouteilles. D'ailleurs, si les témoins du passé réapparaissaient, seraient-ils fables, ne me mentiraient-ils pas ?" (Nouvel Obs 9/10/2014 : http://bibliobs.nouvelobs.com/romans/20141009.OBS1667/les-10-phrases-cles-du-nouveau-modiano-commentees-par-modiano.html )
“Tout ce que l'on vit au jour le jour est marqué par les incertitudes du présent.”L'horizon
“Une impression m'a traversé, comme ces lambeaux de rêves fugitifs que vous essayez de saisir au réveil pour reconstituer le rêve entier.”Rue des boutiques obscures
“Tout cela, c'était notre jeunesse, le matin profond que nous ne retrouverons jamais plus.”La Place de l'Etoile
“Il faut longtemps pour que resurgisse à la lumière ce qui a été effacé.”Dora Bruder
“Nous vivons des temps où l'on finit par ne plus s'étonner de rien.”Les boulevards de ceinture
“Nous aurons beau faire, nous ne connaîtrons jamais le repos, la douce immobilité des choses. Nous marcherons jusqu'au bout sur du sable mouvant.”Les boulevards de ceinture
“Mais, après tout les vraies rencontres sont celles de deux personnes qui ne savent rien l'une de l'autre même dans une chambre d'hôtel.”L'herbe des nuits
“Les dimanches, surtout en fin d'après-midi, et si vous êtes seul, ouvrent une brèche dans le temps. Il suffit de s'y glisser.”L'herbe des nuits
“Des photos comme il en existe dans toutes les familles. Le temps de la photo, ils étaient protégés quelques secondes et ces secondes sont devenues une éternité.”Dora Bruder
“Ce qui nous rend la disparition d'un être plus sensible, ce sont les mots de passe qui existaient entre lui et nous et qui soudain deviennent inutiles et vides.”Villa triste
“Les souvenirs d'enfance sont souvent de petits détails qui se détachent du néant.”Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier
“Si l'on habite près d'une gare, cela change complètement la vie. On a l'impression d'être de passage. Rien n'est jamais définitif. Un jour ou l'autre, on monte dans un train.”La petite Bijou
“Pas de meilleurs moyens que de regarder droit dans les yeux les fantômes pour qu'ils se dissipent.”Dans le café de la jeunesse perdue
“J'ai toujours cru que certains endroits sont des aimants et que vous êtes attirés vers eux si vous marchez dans leurs parages.”Dans le café de la jeunesse perdue
“Comme ce serait étrange si les enfants connaissaient leurs parents tels qu'ils étaient avant leur naissance, quand ils n'étaient pas encore des parents mais tout simplement eux-mêmes.”Une jeunesse
“Le lecteur en sait plus long sur un livre que son auteur lui-même.”
discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014 )
extrait : "Oui, le lecteur en sait plus long sur un livre que son auteur lui-même. Il se passe, entre un roman et son lecteur, un phénomène analogue à celui du développement des photos, tel qu'on le pratiquait avant l'ère du numérique. Au moment de son tirage dans la chambre noire, la photo devenait peu à peu visible. A mesure que l'on avance dans la lecture d'un roman, il se déroule le même processus chimique."
“Le romancier est une sorte de voyant .”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : "Et je ne serais pas loin de croire que dans le meilleur des cas le romancier est une sorte de voyant et même de visionnaire. Et aussi un sismographe, prêt à enregistrer les mouvements les plus imperceptibles."
“Un écrivain – ou tout au moins un romancier – a souvent des rapports difficiles avec la parole.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : "Mais un écrivain – ou tout au moins un romancier – a souvent des rapports difficiles avec la parole. Et si l'on se rappelle cette distinction scolaire entre l'écrit et l'oral, un romancier est plus doué pour l'écrit que pour l'oral. Il a l'habitude de se taire et s'il veut se pénétrer d'une atmosphère, il doit se fondre dans la foule. Il écoute les conversations sans en avoir l'air, et s'il intervient dans celles-ci, c'est toujours pour poser quelques questions discrètes afin de mieux comprendre les femmes et les hommes qui l'entourent. Il a une parole hésitante, à cause de son habitude de raturer ses écrits. Bien sûr, après de multiples ratures, son style peut paraître limpide. Mais quand il prend la parole, il n'a plus la ressource de corriger ses hésitations."
“Curieuse activité solitaire que celle d'écrire.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
extrait : "Curieuse activité solitaire que celle d'écrire. Vous passez par des moments de découragement quand vous rédigez les premières pages d'un roman. Vous avez, chaque jour, l'impression de faire fausse route. Et alors, la tentation est grande de revenir en arrière et de vous engager dans un autre chemin. Il ne faut pas succomber à cette tentation mais suivre la même route. "
“Je dirais même qu'au moment où vous écrivez les derniers paragraphes, le livre vous témoigne une certaine hostilité dans sa hâte de se libérer de vous.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
“J'ai toujours pensé que l'écriture était proche de la musique mais beaucoup moins pure que celle-ci et j'ai toujours envié les musiciens qui me semblaient pratiquer un art supérieur au roman – et les poètes, qui sont plus proches des musiciens que les romanciers.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
“Un romancier ne peut jamais être son lecteur.”Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : " Un romancier ne peut jamais être son lecteur, sauf pour corriger dans son manuscrit des fautes de syntaxe, des répétitions ou supprimer un paragraphe de trop. Il n'a qu'une représentation confuse et partielle de ses livres, comme un peintre occupé à faire une fresque au plafond et qui, allongé sur un échafaudage, travaille dans les détails, de trop près, sans vision d'ensemble."
“Voilà pourquoi le Paris de l'Occupation a toujours été pour moi comme une nuit originelle. Sans lui je ne serais jamais né.”Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : "Dans ce Paris de mauvais rêve, où l'on risquait d'être victime d'une dénonciation et d'une rafle à la sortie d'une station de métro, des rencontres hasardeuses se faisaient entre des personnes qui ne se seraient jamais croisées en temps de paix, des amours précaires naissaient à l'ombre du couvre-feu sans que l'on soit sûr de se retrouver les jours suivants. Et c'est à la suite de ces rencontres souvent sans lendemain, et parfois de ces mauvaises rencontres, que des enfants sont nés plus tard. Voilà pourquoi le Paris de l'Occupation a toujours été pour moi comme une nuit originelle. Sans lui je ne serais jamais né. Ce Paris-là n'a cessé de me hanter et sa lumière voilée baigne parfois mes livres."
“J'appartiens à une génération intermédiaire et je serais curieux de savoir comment les générations suivantes qui sont nées avec l'internet, le portable, les mails et les tweets exprimeront par la littérature ce monde auquel chacun est « connecté » en permanence et où les « réseaux sociaux » entament la part d'intimité et de secret qui était encore notre bien jusqu'à une époque récente – le secret qui donnait de la profondeur aux personnes et pouvait être un grand thème romanesque.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
“Sur le moment, un enfant ne s'étonne de rien, et même s'il se trouve dans des situations insolites, cela lui semble parfaitement naturel.”Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : "Sur le moment, un enfant ne s'étonne de rien, et même s'il se trouve dans des situations insolites, cela lui semble parfaitement naturel. C'est beaucoup plus tard que mon enfance m'a paru énigmatique et que j'ai essayé d'en savoir plus sur ces différentes personnes auxquelles mes parents m'avaient confié et ces différents lieux qui changeaient sans cesse. "
“Pour ceux qui y sont nés et y ont vécu, à mesure que les années passent, chaque quartier, chaque rue d'une ville, évoque un souvenir, une rencontre, un chagrin, un moment de bonheur.”Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : "Pour ceux qui y sont nés et y ont vécu, à mesure que les années passent, chaque quartier, chaque rue d'une ville, évoque un souvenir, une rencontre, un chagrin, un moment de bonheur. Et souvent la même rue est liée pour vous à des souvenirs successifs, si bien que grâce à la topographie d'une ville, c'est toute votre vie qui vous revient à la mémoire par couches successives, comme si vous pouviez déchiffrer les écritures superposées d'un palimpseste. "
“On peut se perdre ou disparaître dans une grande ville.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
“C'est sans doute la vocation du romancier, devant cette grande page blanche de l'oubli, de faire ressurgir quelques mots à moitié effacés, comme ces icebergs perdus qui dérivent à la surface de l'océan.”
Discours de réception du prix Nobel ( 7 décembre 2014)
Extrait : "... La société qu'il décrivait était encore stable, une société du XIXe siècle. La mémoire de Proust fait ressurgir le passé dans ses moindres détails, comme un tableau vivant. J'ai l'impression qu'aujourd'hui la mémoire est beaucoup moins sûre d'elle-même et qu'elle doit lutter sans cesse contre l'amnésie et contre l'oubli. À cause de cette couche, de cette masse d'oubli qui recouvre tout, on ne parvient à capter que des fragments du passé, des traces interrompues, des destinées humaines fuyantes et presque insaisissables.
Mais c'est sans doute la vocation du romancier, devant cette grande page blanche de l'oubli, de faire ressurgir quelques mots à moitié effacés, comme ces icebergs perdus qui dérivent à la surface de l'océan."